Les syndicats, le boycott de la Société Laitière Maggi et la guerre 14-18

Cet extrait est tiré de l’article des Cahiers de la SAEL 2024 consacré aux Laiteries de Pierres et Maintenon au début du XXe siècle par M. Jacques Bresson


Le syndicat laitier du canton de Maintenon, présidé par Mr Gouabault cultivateur à Théléville (Bouglainval), réunissait ses membres pour évoquer les sujets communs en particulier le prix payé aux producteurs.

Camion laitier dans la rue du faubourg Larue à Maintenon en tournée de ramassage 1900
(E. Derolez debout)

Lors de leur assemblée générale de février 1912, ils avaient obtenu des directeurs des deux groupes laitiers présents (Mr Louis Laloy pour la Société Laitière Maggi -S.L.M.- et Charles Edmond Genvrain pour la Laiterie Centrale) une augmentation conséquente de 4 à 5 centimes par litre soit 36% justifiée par l’augmentation du prix des fourrages lié à la sécheresse de l’été 1911.

La laiterie Maggi à Maintenon

Les directeurs des groupes venaient souvent à Maintenon en particulier Louis Laloy directeur d’exploitation de S.L.M. de 1911 à 1941. Il s’était fait construire une grande propriété secondaire, avec jardins et tennis, au N°1 du boulevard Carnot. (Celle-ci sera réquisitionnée en 1939-40 par l’amirauté française puis en 1940-44 par les occupants pour le chef de la kommandantur et ses collaborateurs).

Le succès de la S.L.M. avait suscité l’animosité des grands groupes laitiers et du syndicat des crémiers de Paris, dont le secrétaire général avait dénoncé Maggi comme un avant-poste du capitalisme allemand. Relayées et amplifiées par la presse parisienne, ces rumeurs avaient entrainé des campagnes de boycott et le 3 aout 1914, avec la déclaration de guerre, un saccage du laboratoire, des dépôts et de plusieurs des boutiques parisiennes de la S.L.M.

Boutique parisienne de la SLM

Il s’en suivit l’arrêt des livraisons par la laiterie de Maintenon donc du ramassage du lait dans les fermes. Aussi Mr Gouabault Président du Syndicat des cultivateurs du rayon de Maintenon adressa la lettre suivante au Préfet d’Eure-et-Loir, le 11 août 1914.
« Monsieur le Préfet, J’ai l’honneur de vous exposer qu’il y a dans une vingtaine de communes de la région de Maintenon, environ 700 cultivateurs, membres du syndicat, qui ont vendu par contrat le lait à provenir de leurs vaches à la Société Laitière Maggi. Or, depuis longtemps des bruits tendancieux circulaient représentant cette société comme étant une société d’espionnage au service de l’Allemagne. Lors de l’ordre de Mobilisation générale, la population parisienne qui exècre tout ce qui est allemand, s’est ruée sur un certain nombre de boutiques et dépôts de cette société laitière, qu’ils ont saccagés. Le résultat fut que le ramassage du lait fut cessé à Maintenon. Le lait manqua à Paris pendant que notre produit nous restait pour compte. Le 8 août, le lait fut ramassé de nouveau au dépôt de Maintenon et continue depuis. Mais cette cessation a fortement impressionné nos populations patriotes et beaucoup de fournisseurs ne veulent plus donner leur lait à cette société, à moins qu’il leur soit prouvé que ce n’est pas une société allemande. C’est pourquoi, je prie Monsieur le Préfet, de bien vouloir présenter à Monsieur le Ministre de l’intérieur, mon humble requête et le prier de nous répondre si les cultivateurs du rayon de Maintenon peuvent continuer d’avoir confiance dans la société Laitière Maggi… » …

Blessés et personnel de la croix­ rouge devant la gare de Maintenon

 

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